Le groupe Horizon, « une plateforme de services intégrés » Article d'Immo Week
Le Groupe Horizon est un acteur atypique : société de gestion de portefeuille, développeur, commercialisateur…
Le groupe ne détient pourtant pas d’immobilier directement, car il revend ses opérations en direct. C’est aussi un partenaire clé du logement social, qui finance et soutient de nombreuses opérations de ce type dans tous les centres-villes de France, « là où il y a un marché ». C’est aussi un des rares acteurs à proposer un rendement cible de 5 % par an… Arnaud Monnet, directeur général de Horizon AM, livre les recettes de ce succès et Cédric Nicard, directeur développement durable Horizon AM, en dit plus sur leur dernier fonds en date, « Horizon Impact ».
Comment se compose le Groupe Horizon ? Quel positionnement en matière d’immobilier ?
Arnaud Monnet : constitué il y a bientôt dix ans, le Groupe Horizon est composé de trois entités complémentaires. Horizon AM, société de gestion de portefeuille, investit pour compte de tiers ; Horizon Engineering Management dispose de toutes les compétences nécessaires au développement de nos opérations immobilières et Horizon Service s’occupe de leur commercialisation. Nous ne détenons pas de patrimoine, puisque nous ne conservons jamais les opérations que nous codéveloppons – et a fortiori ne les gérons pas non plus -, nous les finançons. Nous venons en amont des projets, réalisons la construction ou la réhabilitation et les cédons immédiatement. Environ une soixantaine de personnes travaillent au sein du groupe, dont le bureau principal est aujourd’hui rue Cortambert, dans le 16ème arrondissement parisien.
Avec qui co-développez-vous ?
AM : les promoteurs locaux, indépendants – non adossés à un fonds ou une structure financière – et qui ont besoin de tout ou partie de notre expertise ; mais aussi les développeurs et marchands de biens. Nos partenaires peuvent, en effet, choisir quelle compétence, quelle étape du projet, ils vont nous déléguer. Et le risque sera réparti équitablement. Ce qui fait que nous n’avons pas de modèle prédéfini : c’est en fonction du partenaire et de l’opération. Nous nous imaginons comme une plate-forme de services intégrés. Je parle de partenariat car nous souhaitons nous inscrire dans le long terme avec eux, au-delà d’une simple opération immobilière. Cette flexibilité nous oblige à nous connaître, cela prend du temps ; nous travaillons avec certains depuis 5 ans et, au final, nous continuons à lancer des opérations ensemble.
Quelle est la clientèle d’Horizon AM ?
AM : Horizon AM s’adresse à deux typologies d’investisseurs que sont les investisseurs privés – environ un millier de particuliers à ce jour-, d’une part, dans le cadre d’une diversification de leur patrimoine à une fiscalité intéressante (hors IFI, PEA et PEA/PME possible…). Ceux-ci représentaient la quasi-totalité de notre clientèle à l’obtention de notre agrément AIFM en 2016. Dès lors, nous avons structuré nos fonds pour accueillir les investisseurs institutionnels – une dizaine de caisses de retraites, mutuelles et assureurs –, qui ont donné un coup d’accélérateur à nos moyens financiers : entre 2010 et 2016, nous avions collecté un total de 15 millions
d’euros ; ce montant est passé aujourd’hui à 120 millions d’euros (40 millions auprès de notre clientèle privée ; 80 millions, auprès des institutionnels).
Toute cette collecte est placée dans des opérations de construction ou de restructuration d’actifs immobiliers, qui ont générées un volume d’affaire de plus de 600 millions d’euros. Soit un coefficient de création de valeur entre 4 et 4,5… quasi net de dette bancaire : moins de 10 % de nos actifs y sont exposés.
Pourtant, les conditions de dette bancaire sont plutôt intéressantes actuellement…
AM : elles le sont, mais nous pensons qu’elles ne sont pas du tout adaptées au risque immobilier actuel, tel que nous le pratiquons. Aujourd’hui, un promoteur va pouvoir emprunter à un taux de 2-3 %, qui passe d’ailleurs rapidement à 5-6 % lorsque vous y ajoutez les frais et assurances. Mais les conditions requises par les banques vont lui faire porter une bonne partie du risque sur ses épaules, là où nous partageons le risque avec lui.
Cela dit, nous pouvons utiliser cette dette bancaire lors de la phase de refinancement de l’opération, une fois que le projet a été développé, suffisamment commercialisé. Les conditions sont beaucoup plus favorables, avec moins de contraintes… et cela nous permet de dégager nos fonds propres pour les réinvestir dans d’autres opérations. C’est aussi cette rotation des capitaux qui nous permet de proposer un objectif de rendement entre 4 et 6% à nos investisseurs.
Sur quelle(s) typologie(s) d’actifs intervenez-vous ?
AM : quasi exclusivement sur du résidentiel, dont une part importante dans le logement social (40 à 50 % de nos opérations sont réalisées pour le compte de bailleurs sociaux ou à destination de populations à revenu limité). Depuis peu, nous nous intéressons aux autres modes d’habitat tel que les résidences services : nous avons commencé à développer des opérations intégrant des micro-crèches, des maisons médicales, en partenariat avec des opérateurs spécialistes. Nous réalisons également du commerce de proximité, typiquement en pied d’immeuble, dans le cadre d’opérations mixtes, que nous plébiscitons. Mais pas de bureaux. Nous percevons ce segment de marché comme un métier à part, à très forte spéculation et soumis actuellement à de très fortes tensions. Son exposition aux cycles économiques nous fait préférer le résidentiel.
Où co-construisez-vous ?
AM : nous avons réalisé ou lancé 94 opérations depuis la création, majoritairement dans les centres des grandes villes périphériques d’Ile-de-France, mais aussi dans les métropoles régionales et même dans de
grandes villes d’Europe : 10 programmes en Allemagne, un en Espagne, un autre au Portugal. L’Italie, la Belgique… Ce sont des marchés que nous regardons. De par notre cycle de financement assez court – entre 24 et 36 mois de détention –, nous nous établissons dans les zones où un besoin de logement est clairement et immédiatement défini. Or, ce besoin, nous le sentons beaucoup plus prégnant dans les centres de villes périphériques que dans les grandes villes. Nous y recherchons, ainsi, des actifs immédiatement réversibles ou transformables et ne nous interdisons aucune zone géographique, pour peu que la demande existe et que nous puissions trouver un partenaire local. Par exemple, nous avons un projet de transformation de l’ancien centre de tri de La Poste de Voisins-le-Bretonneux (78) en un ensemble résidentiel de 18 logements, baptisé « Coeur Bérénice », dont un tiers a été acheté par CDC Grand Paris Habitat. Nous sommes par définition au coeur de cette ville, qui fait partie de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines, deuxième pôle économique d’Ile-de-France
après La Défense. A ce jour, nous n’avons investi que dans une seule opération dans Paris intra-muros. En cause, bien sûr, la problématique du coût du foncier, mais aussi les prix de sortie d’une opération neuve dans laCapitale, qui correspondent à une clientèle très restreinte.
Comment expliquez-vous l’intérêt des bailleurs sociaux pour votre modèle ?
AM : historiquement, nous avons travaillé avec les bailleurs sociaux lorsque nous intervenions en zone plus excentrée des villes. Nous en faisons de plus en plus et avons réalisé qu’il est plus intéressant – pour notre
modèle – de construire 100 % d’un programme avec un bailleur social que les fameux 25 % de la loi SRU. Le risque de commercialisation est quasi nul ; celui de l’obtention du permis de construire est, lui aussi, limité ; ensuite, nous bénéficiions jusqu’à il y a peu du gain de TVA… Récemment, la réforme engagée par l’Etat sur le logement social a rendu plus prégnant encore notre intervention financière dans les projets des bailleurs. Nous avons, par ailleurs, été identifié par CDC Habitat pour rejoindre la plate-forme d’investissement « Banque des Territoires » afin de développer, en concertation avec les villes, des projets urbains globaux. Une conviction que nous partageons selon laquelle la ville doit se créer non pas par îlots, mais par l’aménagement de zones urbaines cohérentes.
Vous avez récemment lancé un fonds ISR. Quelle genèse ? Quelle démarche ?
AM : l’idée de ce lancement repose sur deux facteurs. Tout d’abord, nous n’avons jamais voulu lancer de stratégie spécifique pour de l’investissement socialement responsable. Mais près de la majorité de notre activité est, par définition, à impact social. Nous avons eu plusieurs demandes, de la part d’investisseurs, pour des fonds spécifiques à ces sujets-là. Nous avons donc lancé, en 2016, le premier véhicule d’investissement ESUS (Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale), dédié aux promotions immobilières à vocation sociale. Une première pour nous, puisque nos fonds, dès la création, ont cette capacité – et l’habitude – de co-investir dans des projets. Nous n’avions jamais « dédié » un fonds à telle ou telle typologie. Les investisseurs ont répondu présent, ce qui nous a encouragé à créer Horizon Impact. Le premier compartiment du fonds, nommé France Habitat, a pour objectif de lever 80 millions d’euros d’ici 2020, qui seront dédiés à accompagner des bailleurs sociaux et des promoteurs locaux dans le développement d’opérations à vocation sociale et éco responsable. C’est pour cette raison que nous avons recruté, au cours de l’été, Cédric Nicard, en qualité de directeur développement durable.
Quelle gouvernance pour ce fonds ?
AM : il est géré, comme traditionnellement, par deux gérants dont mon associé Mehdi Gaiji et Rachid Chakir, un spécialiste du risk management en investissement immobilier. En complément de cette gouvernance classique, nous avons constitué un comité consultatif, qui a pour vocation de nous accompagner dans l’analyse des projets, des opérateurs, sur différentes problématiques identifiées… Deux personnes nous ont fait confiance : Emmanuelle Cosse, conseillère régionale d’Ile-de-France et ancienne ministre du Logement et de l’Habitat Durable, nous apporte une réelle connaissance de l’immobilier dans ses aspects politiques et urbanistiques, mais aussi sur les opérateurs. Jean-Philippe Liard, chargé des questions de l’épargne salariale et de l’épargne solidaire au sein de la CFDT, sera en charge des volets financiers de nos projets.
Comment va-t-il fonctionner ?
Cédric Nicard : nous réalisons, tout d’abord, les « due-diligences » financières conventionnelles, dans le cadre des prises de participation dans le fonds. En parallèle, nous réalisons, en interne, une « due-diligence » ESG, extra-financière, qui nous permet d’attribuer une note ESG à chacune de nos opérations et, à côté de cette note, une analyse des risques et des impacts, positifs et négatifs, de ce projet sur l’environnement, le social et la gouvernance.
Cet audit complet est ensuite présenté au comité de consultation, qui va apporter son expérience et ses réflexions pour, au besoin, ajuster les notations, pointer des risques qui nous auraient échappés. La décision finale d’entreprendre l’opération repose ensuite sur le gérant. Tout au long de la durée de vie du projet, les opérateurs peuvent bénéficier des différentes expertises internes à notre groupe et, le cas échéant, du support du comité consultatif sur des sujets particuliers.
A l’issue de l’opération, nous réalisons un audit « de sortie » qui va permettre, notamment, de valider les évaluations de départ, de bénéficier d’un premier retour d’expérience sur le déroulé de l’opération. Nous consolidons la mesure d’impact que l’on avait pressenti au moment de la sélection. Par exemple, si nous soutenons la construction d’un édifice en bois, on présuppose une économie en carbone estimée par une étude technique, mais on ne sera totalement certains du gain véritable qu’à la livraison. Et au-delà des considérations physiques du bâti : quel pouvoir d’achat réel avons-nous pu dégager pour les locataires d’un logement social que nous avons soutenu ? Si l’on remonte la chaîne, quels choix techniques ont une influence ?
Des opérations déjà amorcées ?
AM : il existe trois grandes cibles d’opérations. Premièrement, toutes les opérations à thématique du logement social et abordable. La deuxième concerne la maison médicale : nous avons noué un partenariat avec Les Maisons Médicis qui soutiendra la réalisation de maisons médicales – bâtiment indépendant ou en pied d’immeuble – ou de maisons à destination des personnes en situation de handicap physique – avec un système de conciergerie médicale. Troisième cible : la création d’éco-quartier, notamment avec de la construction en modulaires en bois. Nous avons identifié les régions du Val d’Oise et de l’Oise comme territoires à très forte demande. En tout, cela représente, pour 2019, un portefeuille de projets d’une cinquantaine de millions d’euros d’investissements, la production d’environ 1 500 logements, sur plus d’une vingtaine d’opérations. Nous visons l’établissement d’une dizaine de partenariats avec des opérateurs spécialistes et nous souhaitons monter entre 5 et 10 projets avec chacun d’entre eux. Le cycle d’investissement est prévu pour 36 mois ; la durée de vie de notre fonds est de 7 ans. Ce qui nous permet, à mi-chemin, de réemployer les capitaux investis dans une première opération dans un nouveau cycle d’investissement, cette rotation financière doit nous permettre le taux rendement cible de 5 % par an.